jeudi 26 mai 2011

ENERSA WAKA WAKA: JOUR 4

On se réveille vers 7h30, Frantz me dit que la nuit n’a pas été facile. Il était « gonflé » diarrhée et vomissement. Je n’ai rien su. Moi aussi j’ai dû évacuer quelques éléments indésirables de mon intestin. C’est surement l’excès d’huile. Les Sénégalais cuisinent avec beaucoup d’huile. Asssane vient nous réveiller, les techniciens qu’on doit former sont déjà là. Je prends une douche rapidement et je sors. Assane nous présente les 4 techniciens qu’on doit former : Khadim, Djibbi, Seringne et un stagiaire Mohamed.
Je demande à Assane d’appeler à l’aéroport pour la valise de Frantz. On lui dit que oui, elle est là. On doit donc aller la récupérer à Dakar. De toute façon, on ne peut travailler sans la valise. En plus, on a le reste du matériel à acheter.  Assane doit s’occuper du voyage à Dakar et, entre temps, comme les gens de Kayer ont deux panneaux qui ne fonctionnent pas, on va les vérifier. Ce sont des panneaux de 165 Watts. Je teste les panneaux, des gamins leur ont lance des pierres. Les panneaux ne sont pas complètement finis, ils fonctionnent à 60%. Je leur dit que ça peut servir quand même.
Assane arrive avec Diagne, celui qui était allé nous chercher à l’aéroport. Haddim va venir à Dakar avec nous également. Vers 11h00, on quitte Mekhe pour Dakar. Je vais enfin pouvoir voir le paysage de plus près, jusqu'à présent, je n’ai vu que le petit village où nous sommes. Sur la route on croise une horde de vautour en train de manger la carcasse d’un bœuf, probablement heurté par une voiture. La route est bordée de champs des 2 côtés, mais le sol est toujours sablonneux ou même sec. Les paysans arrivent quand même à planter. Je leur tire mon chapeau ! Je vois même des champs de manguiers. Une variété qu’on n’a pas chez nous. Les marchandes en vendent tout le long de la route.
Il y a plein de check-points sur la route, c’était aussi le cas lors de notre arrivée. A un check-point, les gendarmes (à part l’uniforme, je ne vois pas de différence entre la gendarmerie et la police) ont fait signe à un bus d’arrêter, les marchandes de mangues se lèvent aussitôt pour aller proposer des mangues aux passagers. Une scène assez familière…
On arrive à Thiès, la deuxième ville du Sénégal. L’entrée de Thiès, ressemble beaucoup à celle des Gonaïves, avec le commerce informel, des mécaniciens sur un sol désertique et poussiéreux. Diagne m’explique que le maire de la ville, qui fut 1er ministre est à couteau tiré avec le Président Wade. J’avais lu quelque chose à ce sujet, il avait été accusé de corruption mais il a été blanchi. C’est lui qui a changé l’image de la ville : les routes sont goudronnées, les places du centre-ville ont été réhabilitées et il a redynamisé la vie économique, Dakar étant trop peuplé. Tata Motors a meme ouvert une usine d'assenmblage à Thiès ! Ca lui donne une certaine popularité alors pour torpiller son travail, la Senelec impose des coupures à Thiès de 15 à 20 heures par jour ! La Senelec c’est la compagnie nationale d’électricité, le ministre de l’énergie c’est le fils du Président…
Je fais une remarque sur les check-points, et je dis qu’avec autant de check-points, la police fait forcement son travail ! Diagne éclate de rire. En fait, les check-points c’est aussi un système de racket ! En fait, on t’arrête même si tous tes papiers sont en règle. Le mot de passe c’est 1 000 F. Avec ça, ils doivent bien doubler ou même tripler leur salaire. Pour aller de Dakar à St-Louis, il faut compter au moins 10 000 F surtout les bus et les camions ! Bon, ça doit quand même avoir un effet dissuasif…
On continue vers Dakar, on passe de village en village. Il y a des constructions sur toute la route. Plus on avance vers Dakar, plus la circulation automobile devient dense.
On arrive dans la ville, elle est moins attrayante que ce que j'ai vu l’autre nuit. Trop de monde. Il y a plein de petits commerces informels, des marchands ambulants qui proposent des cartes de téléphones, des journaux, des « pistaches », des fruits etc. Une affiche attire mon attention, on vend une petite voiture japonaise à 7 400 000 F. Je me rappelle que quand on a demandé d’afficher les prix en gourdes en Haiti, certains trouvaient que c’était ridicule d’afficher le prix d’une voiture à 2 000 000 de gourdes. Les prix ici sont en franc, je n’entends jamais parler ni d'euro, ni de dollars.
Leur réseau routier est en bien meilleur état que le notre. On voit d’ailleurs beaucoup moins de 4x4. On retourne à l’aéroport pour récupérer la valise. On ne laisse pas rentrer Assane et Hadhim. J’avais pris le soin d’amener nos passeports. Je rentre avec Frantz, assez vite fait. On prend la valise, vérification à la douane et on part. Assane a des courses à faire dans le coin de l’aéroport, on l’attend. Ensuite on file en ville, il faut trouver l’aluminium. On prend l’autoroute direction centre-ville.
Le centre-ville ressemble un peu à celui de Port-au-Prince. Ca circule mieux par contre. Il y a beaucoup de taxis, peu de motos et des autobus. Mélange de commerce formel et informel. Le « made in China » est partout. Il y a beaucoup de marchands de vêtements, des vêtements plus sexys qu’islamiques! Je ne savais pas que les Sénégalaises avaient les cheveux aussi longs ha! ha! ha!
On s’arrête dans un magasin d’aluminium, on a de la chance, il y a ce qu’il faut, je fais un calcul rapide pour savoir combien de barres acheter. Diagne a une petite voiture, on doit donc couper l’aluminium sur place.  Je donne les dimensions, le type revient avec une scie à métaux ! Je m’attendais plus à un « mitter saw ». Bon, il faut dire que le « temps » ne doit pas coûter si cher au Sénégal. Après une demie heure, on met les morceaux d’aluminium dans le coffre, on a eu le temps d’acheter la silicone, il nous faut des fers à souder, de l’étain etc.
On passe dans une zone bourrée de quincailleries, on dit à Diagne d’aller se garer, on va marcher. Grosse impression de déjà vu, les magasins dans ce quartier là sont tenus pour la plupart par des Sénégalais d’origine libanaise ou syrienne. On discute avec le type derrière le comptoir, assez sympa, il nous dit qu’il est de la 3ème génération et qu’il n’a jamais mis les pieds au Liban. Ces enfants sont nés au Sénégal. Hm ! Combien d’arabes de la 4ème génération sont haïtiens ?  Il nous dit que la vie est devenue chère, le litre d’essence coute 800 F ! Avec 45 000 F il ne remplit pas sa voiture… (450 F pour 1$US).

Lorsqu’on retourne à la voiture, Diagne a sorti son tapis, il est sur le trottoir en train de prier. On voit ça couramment ici, les gens prient n’ importe où. J’en ai vu à l’aéroport, dans les magasins, sur les trottoirs…









Ce centre-ville va connaitre le même sort que celui de Port-au-Prince. Le commerce informel a déjà envahi plusieurs trottoirs. Dans certaines rues, la 2ème vague est déjà là, ils s’installent sur le bitume et comme on ne leur dit rien, il y aura une 3ème puis une 4ème vague jusqu'à ce que la rue soit complètement bloquée.
On a du mal à trouver de l’étain, on n’a trouvé qu’un seul rouleau. Je leur dit qu’au centre-ville il doit surement avoir un quartier où l’on répare des TV et des radios, ces types là nous diront où trouver de l’étain. Ils disent que ça doit exister mais ils ne savent pas où en trouver. Il nous faut aussi du plastique pour le dos des panneaux. On continue à chercher, on va près du port, on roule, roule dans le quartier du plateau, on arpente le centre-ville, on trouve un autre rouleau dans l’informel. Toujours pas suffisant. Frantz arrête une marchande de thé, il lui donne 100 F, la fille lui tend un verre.
« Ooooohhhh epa li pa lave’l »!
En effet tout le monde boit dans les mêmes verres ! Je décline poliment l’offre de la marchande. C’est vrai qu’on a une assurance maladie mais quand même… Je préfère acheter un kilo de mandarine ! On trouve le plastique qu’il nous faut, pas la bonne couleur, marron ou… rose ! Pour ne pas être bloque et démarrer la formation, on prend quelques aunes de marron. Je dis de demander au type s’il peut nous trouver la couleur bleu marine. Il dit que c’est possible. Assane note son numero de téléphone. On l’appellera demain.
Il est plus de 19h00 et on n’a rien mangé depuis ce matin.  On est dans le même état les 5, il faut manger quelque chose, sinon on va tomber. Frantz a tellement faim qu’il a mal à la tête, il rentre dans une pharmacie et achète un boite de comprimés ! Nèg la grangou, li pa bwè dlo epi lap pran grenn pou mal tèt.  On s’arrête dans un fast food libanais au centre-ville. On prend du poulet les 5, bon ce n’est pas de la fine cuisine, mais j’ai faim. Frantz dit que le poulet qu’il mange n’a pas de « p », ni de « o » ni de « u »…
A 20h30, on quitte Dakar pour retourner a Mekhe. Petit embouteillage pour sortir de la ville, avec coupure de courant ! Je demande pourquoi il y a les coupures si les gens paient. Eh bien il semble que l’argent de la Senelec est utilisé à d’autres fins, un peu comme la TELECO sur Aristide ! Des projets moins chimeriques mais… D’ailleurs la nouvelle qui fait la une ces jours-ci c’est qu’un opposant politique a reçu du gouvernement 30 000 000 F par mois pendant 10 ans. Ca fait 65 000 $US par mois ! Voilà où va l’argent de la Senelec.
Et les routes ? Selon mes hôtes, quand ça coûte 1 milliard de dollars, Wade en déclare 3. Le Président ne semble pas être très apprécié par la population. D’ailleurs en venant, j’ai vu un vendeur de journaux : « Wade est pire que Gbagbo » titrait le quotidien en manchette.
A la sortie de Dakar, après Rufique je me suis endormi.
Je me réveille avec un bruit d’enfer !

BBBOOOOWWWWWWWWWWW !!!!!!

M'pantan !

La voiture est entrain de bouger ! Je me rends compte que je suis seul dans la voiture ! Un camion vient de nous rentrer dedans. Je sors de la voiture, il fait froid ! On est en dessous de 20 degrés c’est sûr ! Qu’est-ce ce qui se passe ?
Frantz m’explique qu'on est à un check-point. Le permis de Diagne est expiré, il a offert 2 000 F, le policier dit que ce n’est pas assez. Le camion à qui on a fait signe d’arrêter est rentré dans la voiture d’Assane! Grosse engueulade en wolof, Diagne, Hadhim et Assane d’un côté, les 2 flics, le chauffeur et son passager, de l’autre. Assane est vraiment furieux ! Finalement, on pousse la voiture de Diagne pour la dégager. Le choc a éclaté le pneu avant droit. Le chauffeur du camion paie « la taxe » et un des flics est retourné dans la voiture. L’autre continue ses « vérifications ».
Il fait tellement froid qu’on prend des vêtements dans la valise pour ne pas geler. On est quand meme à la fin mai ! On change le pneu, on n’est pas loin de Mekhe me dit-on. On traverse un autre petit village, là aussi il y a du courant et les rues sont éclairées. Si l’essence coûte si cher, comment arrivent-ils à avoir le courant dans ces petits villages? Même si les gens paient les taxes, ces villages ne sont pas riches, il n’y a pas d’industrie. J’espère trouver la réponse avant de partir.
On arrive à l’UGPM en 15 min.
Grosse journée ! On va enfin pouvoir commencer la formation demain.


1 commentaire:

  1. intéressante les descriptions, et parallèles, distances, allées et venues, entre Sénégal et Haïti

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